1. Le Prophète ﷺ affirme que celui qui jeûne le mois de Ramadan en croyant qu’Allah – exalté soit- Il – le lui a imposé et en croyant aux promesses faites par Allah aux jeûneurs et à ce qu’Il leur a apprêté, en mettant en dépôt auprès d’Allah la rétribution et la récompense méritée pour ce jeûne, sans espérer de rétribution par quelqu’un d’autre que Lui, et en ne recherchant qu’à satisfaire Allah sans ostentation ou recherche d’avoir une bonne réputation, en accueillant le mois de Ramadan avec joie et en mettant à profit son temps pour obéir à Allah et se rapprocher de Lui, sa rétribution est qu’Allah lui pardonnera ses péchés passés.
Le jeûne consiste à avoir l’intention d’adorer Allah, en s’abstenant de manger, de boire et d’avoir des rapports intimes, depuis l’appel à la prière de l’aube jusqu’à l’appel de la prière du coucher du soleil, en raison des paroles d’Allah :
﴾mangez et buvez jusqu’à ce que se distingue, pour vous, le fil blanc de l’aube du fil noir de la nuit. Puis accomplissez le jeûne jusqu’à la nuit﴿
[Sourate Al-Baqara : 187]
Par ailleurs, Allah dit dans un hadith qoudsi:
« Il délaisse son plaisir charnel et sa nourriture pour Moi »
Ensuite le Prophète ﷺ nous informe que celui qui veille la Nuit du Destin pour prier, invoquer et évoquer Allah, lire le Coran et accomplir d’autres adorations, tout en ayant la foi et en espérant être rétribué, ses péchés passés lui seront pardonnés. Il n’est pas exigé pour cela que le serviteur veille toute la nuit, la rétribution peut être obtenue en ne veillant qu’une partie de la nuit, même une courte partie, comme lorsqu’on se contente d’accomplir la prière d’At-Tahajjoud ou la prière d’At-Tarawih derrière un imam [2].
Cette nuit a été qualifiée de Nuit du Destin, car elle a une immense valeur auprès d’Allah. C’est durant cette nuit que le Coran est descendu vers la Demeure de la Puissance dans le ciel inférieur, conformément aux paroles d’Allah :
﴾Nous l’avons certes, fait descendre (le Coran) pendant la Nuit du Destin﴿
. C’est également durant cette nuit que sont copiées les destinées de l’année des serviteurs à partir de la Tablette Préservée et qu’elles sont assignées à leurs moments précis [3]. De plus, Allah fit aux serviteurs la faveur de compter doublement les bonnes actions durant cette nuit, conformément aux paroles d’Allah :
﴾La Nuit du Destin est meilleure que mille mois﴿ .
Par ailleurs, la Nuit du Destin n’est pas précisément déterminée et est une des dix dernières nuits de Ramadan. Par conséquent, celui qui veille les dix dernières nuits de Ramadan aura incontestablement veillé la Nuit du Destin. La Mère des Croyants ‘A’icha – Qu’Allah a agréée – a dit :
« Lorsque les dix dernières nuits commençaient, le Prophète ﷺ serrait son pagne, animait sa nuit et réveillait ses épouses » .
Elle est plus susceptible d’être une des nuits impaires des dix dernières nuits de Ramadan, conformément aux paroles du Prophète ﷺ qui dit : « Recherchez la Nuit du Destin parmi les nuits impaires des dix dernières nuits de Ramadan » [5].
3. Dans l’autre hadith, le Prophète ﷺ nous apprend que celui qui veille toutes les nuits en ayant la foi et en espérant être rétribué, ses péchés passés lui seront pardonnés. Il n’y a pas d’incohérence dans le fait que les péchés soient pardonnés lorsqu’on veille toutes les nuits de Ramadan ou lorsqu’on ne veille que la Nuit du Destin, car les deux expient les péchés, mais on trouve dans chaque œuvre ce qu’on ne trouve pas dans l’autre. Ainsi, veiller toutes les nuits de Ramadan est pénible et on veille donc incontestablement la Nuit du Destin. Les péchés sont donc pardonnés pour avoir veillé toutes les nuits de Ramadan et pour avoir veillé la Nuit du Destin. D’autre part, ne veiller que la Nuit du Destin n’est pas aussi pénible que veiller toutes les nuits de Ramadan, mais elle nécessite qu’on la recherche et qu’on la scrute. Or, on peut la trouver comme on peut la manquer. Par conséquent, il est meilleur de veiller toutes les nuits du mois en raison de l’immensité de la rétribution et de la certitude que l’on a veillé la Nuit du Destin.
Comment appliquer ce hadith
1. (1) Une des manifestations de la sollicitude d’Allah à notre égard est qu’Il nous accorda des mérites et des spécificités à des temps et à des lieux qu’Il n’accorda pas à d’autres. Ainsi, il fit du jour de ‘Arafa le meilleur jour de l’année, du vendredi le meilleur jour de la semaine, de la Ka’ba la meilleure des contrées, de Ramadan le meilleur des mois et de la Nuit du Destin la meilleure de toutes les nuits. Allah associa à ces temps et à ces lieux un immense succès et une réussite éclatante qui motivent l’être humain à œuvrer et à profiter des occasions spirituelles.
2. (1) Il est nécessaire d’œuvrer avec foi et espoir d’être rétribué, car les œuvres ne sont pas acceptées de celui qui n’est pas croyant et elles ne sont pas rétribuées lorsqu’elles sont accomplies par quelqu’un qui n’espère pas être rétribué ou qui les accomplit par ostentation ou par recherche de prestige, car le Prophète ﷺ a dit : « Certes, les actes [d’adoration] sont accomplis avec des intentions » [6] . Le musulman doit donc faire précéder toute œuvre d’une intention sincère et espérer être rétribué pour tout ce qu’il fait dans la finalité de satisfaire Allah.
3. (1) La foi et l’espoir d’être rétribué constituent le fondement de toute œuvre, au point qu’ils ont été réunis par Talq Ibn Habib – qu’Allah lui fasse miséricorde – dans sa définition de la piété lorsqu’il dit : « Cela signifie œuvrer en obéissant à Allah tout en étant éclairé par la lumière d’Allah et en espérant la récompense d’Allah, et délaisser la désobéissance à Allah tout en étant éclairé par la lumière d’Allah et en redoutant le châtiment d’Allah ». Il est donc nécessaire que toute œuvre ait comme point de départ la foi et comme point d’arrivée la rétribution d’Allah et le désir de Le satisfaire [7].
4. (2) Allah laissa la Nuit du Destin indéterminée afin que le serviteur s’efforce d’obéir à Allah à tout moment et qu’il ne L’adore pas durant une nuit déterminée et délaisse les autres nuits. C’est pour la même raison qu’il laissa indéterminée l’heure du vendredi au cours de laquelle les invocations sont exaucées : afin que Ses serviteurs l’invoquent tout au long de ce jour-là.
5. (2) Les actes de transgression figurent parmi les causes majeures empêchant le serviteur de tirer profit des bonnes œuvres. En effet, le Prophète ﷺ sortit une nuit informer les gens que cette nuit-là était la Nuit du Destin et, trouvant deux hommes qui se disputaient dans la mosquée, c’est pour cette raison qu’il oublia d’en informer les gens [8] . Le musulman doit donc s’éloigner des actes de désobéissance afin qu’Allah illumine son cœur et lui facilite de tirer profit des occasions spirituelles et des bonnes œuvres.
6. (3) Tu disposes de deux choix pour obtenir le pardon d’Allah : l’un est pénible, mais n’est pas dépourvu du plaisir d’adorer Allah et de se rapprocher de Lui et il consiste à veiller toutes les nuits de Ramadan. L’autre est facile et se limite à veiller la Nuit du Destin après l’avoir recherché. Le premier est certitude et l’autre est fondé sur la conjecture et la probabilité. Que veux-tu donc choisir : la conjecture ou la certitude ?
7. (3) Ibn Rajab – qu’Allah lui fasse miséricorde – a dit :
« Les amoureux trouvent les nuits trop longues et, chaque année, ils comptent une à une les nuits qui restent avant les dix dernières nuits de Ramadan, puis dès qu’elles arrivent, ils obtiennent ce qu’ils recherchent et se mettent au service de leur Bien-aimé » .
8. Un poète a dit :
Ô Ramadan, ta main est pleine de bonnes actions et l’univers navigue dans la lumière de ta beauté.
Ô cortège dont les drapeaux sont saints et pour lequel le monde s’embellit et se parfume.
Tu es venu empli de miséricorde, le ciel est illuminé et sur la Terre s’étend la lueur de l’aube dès que
tu apparais.
Les âmes clament ta venue et le besoin qu’elles ont de toi les presse de sortir en pleurs.
1. Al-Boukhari (1894) et Moslim (1151)
2. Voir Tarh at-Tathrib Fi Charh at-Taqrib d’Al-‘Iraqi (4/161).
3. Voir Al-Moufhim Li-ma Achkal Mine Talkhis Kitab Moslim d’Abou Al-’Abbass Al-Qourtoubi (2/390).
4. Al-Boukhari (2024) et Moslim (1174).
5. Al-Boukhari (2017) et Moslim (1169)
6. Al-Boukhari (1) et Moslim (1907).
7. Voir Ar-Rissala At-Taboukiyya, Zad Al-Mouhajir Ila Rabbi d’Ibn Al-Qayyim (1/10) et Madarij As-Salikine d’Ibn Al- Qayyim (1/459)
8. Al-Boukhari (2023).
9. Voir Latâ`if Al-Ma’ârif d’Ibn Rajab (p.204).