1- Le Prophète ﷺ fit un jour un sermon émouvant à ses Compagnons, durant lequel il leur inspira la crainte en parlant d’Allah et les avertit contre Sa colère et Sa punition, au point que les cœurs furent terrifiés et que les larmes coulèrent des yeux sous l’effet de la frayeur et de la crainte.
2- Un des Compagnons lui dit : Tu as poussé l’exhortation à l’extrême et tu lui as donné toutes les caractéristiques qu’elle mérite. Elle englobe en effet tout ce qui concerne la religion du musulman et ressemble à celle d’un individu qui fait ses adieux avant de partir en voyage ou de mourir et qui n’oublie de parler en détail de rien de ce qui concerne la personne à laquelle il fait ses adieux[1].
Fais-nous donc une recommandation, ô Messager d’Allah, et donne-nous un conseil exhaustif.
3- La première chose que recommanda le Prophète ﷺ fut de craindre Allah, la crainte d’Allah
consistant à ce que l’être humain mette entre lui et ce qui provoque la colère d’Allah une protection et un voile. Or ceci n’est possible que si on obéit à Allah et qu’on suit Son Messager ﷺ.[2] Talq Ibn Habib – qu’Allah lui fasse miséricorde – l’a définie ainsi : « La piété consiste à ce que tu œuvres de manière à obéir à Allah, éclairé par la lumière d’Allah et en espérant la récompense d’Allah, et à t’abstenir de désobéir à Allah, éclairé par la lumière d’Allah et en redoutant la punition d’Allah »[3].
4- Puis le Prophète ﷺ donna comme deuxième recommandation, l’obligation d’écouter et d’obéir aux détenteurs de l’autorité auxquels il est obligatoire d’obéir lorsqu’ils ordonnent d’obéir à Allah et de réaliser des choses convenables. Si en revanche ils ordonnent un acte de désobéissance, il n’est permis à personne de leur obéir dans cette désobéissance. Le Prophète ﷺ dit en effet : « L’individu musulman doit écoute et obéissance dans ce qu’il aime comme dans ce qu’il déteste, sauf si on lui ordonne un acte de désobéissance. Dans ce cas, il ne doit ni écoute ni obéissance »[4].
Les paroles du Prophète ﷺ : « fut-il un esclave abyssin » signifient : Même si le détenteur de l’autorité est un esclave abyssin, écoutez et obéissez. Or le Prophète ﷺ exigea que l’une des conditions que doit remplir le détenteur de l’autorité, ce soit la liberté et l’appartenance à Qouraych. Le Prophète ﷺ a donc dit cela soit en guise d’exagération afin de souligner l’obligation d’obéir au détenteur de l’autorité même dans un cas de figure qui ne se présentera pas, soit parce qu’il savait que la situation allait empirer plus tard au point que les gens allaient finir par être dirigés par des personnes à qui il n’était pas permis de détenir l’autorité et qu’à ce moment-là écouter et obéir était le moindre mal. Il vous faudra alors être patient sous l’autorité de celui à qui il n’est pas permis de la détenir pour que cela ne débouche pas vers des troubles plus graves. Une troisième hypothèse est que le Prophète ﷺ parlait des petites responsabilités et des personnes qu’on emploie. Quoi qu’il en soit, le Prophète ﷺ imposa l’obéissance au détenteur de l’autorité et rendit illicite de leur désobéir, sauf s’ils ordonnent un acte de désobéissance ou qu’ils manifestent de la mécréance[5].
5- Le Prophète ﷺ nous informe ensuite que nous verrons après lui des troubles et des évènements graves et qu’on en échappera qu’en s’attachant à sa Sounna et celle des Califes Bien Guidés qui sont Abou Bakr, ‘Omar, ‘Othmane et ‘Ali – qu’Allah a agréés. Il ordonna de s’y attacher aussi fortement que celui qui mord une chose avec ses canines de crainte qu’elle lui échappe.
Le Prophète ﷺ ne mentionna spécifiquement la Sounna des califes que parce qu’il était certain qu’ils ne contreviendraient pas à la sienne et parce que certaines de ses Sounane, qui n’étaient pas connues à son époque, le sont devenues à leur époque, car ils se sont préoccupés de les faire revivre et de ce fait on les leur a attribuées alors qu’elles faisaient partie de sa Sounna à l’origine[6]. Il se peut également que le terme califes désigne les savants majeurs de l’Islam, car ils sont les successeurs du
Prophète ﷺ dans le fait de faire revivre le vrai, de faire triompher la religion et d’orienter les gens dans le droit chemin[7].
6- Puis le Prophète ﷺ met en garde contre les choses inventées qui n’existaient pas à son époque, car toute chose inventée en religion est égarement et perdition.
Par ailleurs, les innovations doivent avoir deux spécificités :
- Elles doivent ne concerner que la religion. Ainsi, les inventions, les améliorations et autres progrès qui concernent ce bas monde n’entrent pas dans les innovations [mentionnées dans ce hadith].
- Elles doivent n’avoir aucune origine dans la religion.
Le Prophète ﷺ dit en effet :
« Celui qui innove dans notre affaire-ci une chose qui n’en fait pas partie, son acte se verra être rejeté
»[8]. Ainsi, quiconque invente quelque chose et l’attribue à la religion sans que cette chose n’ait d’origine dans la religion est dans un égarement et la religion en est innocente, qu’il s’agisse de ce qui touche aux croyances, aux œuvres ou bien aux paroles prononcées ou dites intérieurement[9].
Si une chose a dans la religion une origine à laquelle elle est analogue, ce n’est pas une innovation et elle n’est pas interdite. Même si elle est qualifiée d’innovation, il ne s’agit que de terminologie linguistique et le terme désigne alors ce qui est nouveau. C’est pourquoi ‘Omar Ibn Al-Khattab, qu’Allah a agréé, dit lorsqu’il rassembla les gens pendant le mois de Ramadan pour accomplir la prière de la veillée nocturne derrière Oubayy, qu’Allah a agréé : « Quelle bonne innovation que ceci »[10]. En effet, le Prophète ﷺ avait déjà rassemblé les gens pour cette prière dans le passé et il délaissa cette habitude de crainte qu’ils ne la considèrent comme une obligation.
1. (1) Tout prédicateur, savant et éducateur doit faire des sermons à ses compagnons de temps à autre sans être insistant. En effet, ‘Abd Allah Ibn Mas’oud faisait un rappel aux gens chaque jeudi et un homme lui dit : Ô Abou ‘Abd Ar-Rahmane, j’aurais aimé que tu nous fasses un rappel chaque jour. Il répondit : « Ce qui me retient de faire cela c’est que je déteste vous ennuyer. Je vous
prodigue des rappels de temps à autre comme le Prophète ﷺ le faisait avec nous de crainte de nous ennuyer »[11].
2. (1) Un des signes permettant de reconnaître les croyants, est que lorsqu’ils entendent les paroles
d’Allah ou du Prophète ﷺ , ils les écoutent, aspirent à connaître leur signification, leurs cœurs sont pris de frayeur et des larmes coulent de leurs yeux sous l’effet de la crainte d’Allah.
﴾Les vrais croyants sont ceux dont les cœurs frémissent quand on mentionne Allah. Et quand Ses versets leur sont récités, cela fait augmenter leur foi﴿ . Vois donc en toi si tu retrouves ces signes.
3. (2) Le sermon du prédicateur doit contenir les règles générales à suivre et les questions universelles.
4. (2) Il est recommandé au musulman de demander aux sages et aux gens de science et de religion de lui prodiguer des conseils.
5. (3) Efforce-toi de craindre Allah et de Le satisfaire par tes actes publics et privés, car la crainte
d’Allah sauve des troubles et des malheurs dans le bas monde et de l’Enfer dans l’au-delà.
6. (3) Un poète a dit :
Lorsque l’individu ne porte pas des vêtements de piété, il est nu quand bien même serait-il habillé. Le meilleur vêtement de l’individu est l’obéissance à son Seigneur et nul bien en celui qui désobéit à Allah.
7. (4) Écoute le détenteur de l’autorité et obéis-lui tant qu’il n’ordonne pas un acte de désobéissance ou ne manifeste pas de la mécréance.
8. (4) Endurer patiemment l’injustice des détenteurs de l’autorité est meilleur que de s’engouffrer dans des troubles où le sang est versé et l’unité et le groupe des musulmans sont disloqués.
9. (5) Le salut est dans le suivi de la Sounna, car celui qui nous a transmis la Sounna ﷺ n’a manqué de nous indiquer aucun bien ni de nous mettre en garde contre aucun mal.
10. (5) Prendre les Compagnons du Prophète ﷺ pour modèles est le meilleur moyen de parvenir au vrai, car ce sont les gens les mieux instruits sur la révélation et son contenu et ceux qui connaissent le mieux le Prophète ﷺ et sa voie.
‘Omar Ibn ‘Abd Al-’Aziz – qu’Allah lui fasse miséricorde – a dit : « Arrête-toi là où se sont arrêté ces gens-là, dis ce qu’ils ont dit et tais-toi là où ils se sont tus, car ils se sont arrêtés en étant éclairés par la science, ils ont renoncé à certaines choses par clairvoyance, alors qu’ils étaient plus à même [que nous] de les découvrir et ils avaient plus de mérite à le faire si cela avait été requis. Cela signifie : Si ce que vous suivez est la guidée, alors vous prétendez les y avoir devancés. Si vous dites que ceci est apparu après eux, alors celui qui l’a fait apparaître n’est que quelqu’un qui emprunte une autre voie que la leur et refuse de les prendre pour modèles. Ce sont assurément eux
les pionniers et ils ont rapporté de lui (le Prophète ﷺ ) ce qui est suffisant et ont décrit de lui ce qui répond à toute interrogation. Aucun coupable de manquements ni aucun zélé ne le connaissent mieux qu’eux. Certains coupables de manquements se sont détournés de lui et certains zélés sont devenus fanatiques. Ils étaient donc entre les deux sur une guidée droite »[12].
11. (5) Les Successeurs (tabi’oune) – qu’Allah leur fasse miséricorde – étaient les plus préoccupés à se conformer à la Sounna du Prophète ﷺ et de ses Compagnons. Ibrahim An-Nakha’i – qu’Allah lui fasse miséricorde – a dit : « S’il me parvenait qu’ils – c’est-à-dire les Compagnons – ne dépassaient pas dans leurs ablutions l’emplacement d’un ongle, je ne le dépasserai pas non plus. Il suffit comme péché pour être grave que des gens contredisent dans leurs œuvres les Compagnons de leur Prophète ﷺ »[13].
12. (6) Prends garde aux innovations et de mettre en pratique ce qui n’a aucune origine dans la religion d’Allah ni dans la Sounna du Prophète ﷺ, car le vrai est contenu dans le Coran et dans la Sounna et nulle part ailleurs.
13. (6) Il n’y a pas dans la religion de bonne innovation et de mauvaise innovation. En effet, tout ce qui a été inventé dans la religion d’Allah et ne suit pas la méthode du Prophète ﷺ est nul et son auteur commet un péché.
Références
- Voir Charh Al-Michkate Al-Kachif ‘An Haqa`iq As-Sounane d’At-Tibi (2/633) et Jami’ Al-’Ouloum wa Al-Hikam d’Ibn Rajab (2/114).
- Voir le commentaire de Riyad As-Salihine d’Ibn ‘Othaymine (2/276).
- Voir Ar-Rissala At-Taboukiyya Zad Al-Mouhajir Ila Rabbih d’Ibn Al-Qayyim (1/9) et Madarij As-Salikine d’Ibn Al- Qayyim également (1/459).
- Al-Boukhari (7144).
- Voir Touhfat Al-Abrar Charh Massabih As-Sounnah d’Al-Baydawi (1/137) et le commentaire de Al-Arba’oune An- Nawawiyya d’Ibn Daqiq Al-’Id (p.97).
- Voir Al-Mouyassar Fi Charh Massabih As-Sounnah d’At-Tawrabachtî (1/89) et Al-Mafatih Fi Charh Al-Massabih d’Al-Moudhiri (1/272).
- Voir Touhfat Al-Abrar Charh Massabih As-Sounnah d’Al-Baydawi (1/137).
- Al-Boukhari (2697) et Moslim (1718).
- Voir Jami’ Al-’Ouloum wa Al-Hikam d’Ibn Rajab (2/128).
- Al-Boukhari (2010).
- Al-Boukhari (70) et Mouslim (2821).
- Voir I’lam Al-Mouwaqqi’ine ‘Ane Rabb Al-’Alamine d’Ibn Al-Qayyim (4/115).
- Voir I’lam Al-Mouwaqqi’ine ‘Ane Rabb Al-’Alamine d’Ibn Al-Qayyim (4/115).