1- Le Prophèteﷺ avertit sa communauté que lorsque le serviteur fera face à Allah, il sera nécessairement interrogé sur quatre choses. Il doit donc se préparer à ces questions et faire en sorte qu’elles aient des réponses. Une des manifestations de la miséricorde d’Allah est qu’Il ne rendit pas à l’être humain ces questions opaques et inaccessibles, mais en fit des questions claires et en informa le Prophète .
2- La première de ces questions concerne le temps qu’Allah a permis au serviteur de vivre sur la terre : comment l’a-t-il passé et l’a-t-il gaspillé ou pas ? Est-ce en obéissant à Allah ou en Lui désobéissant ? C’est la raison pour laquelle le Prophète ﷺ recommanda aux membres de sa communauté de tirer profit de leur temps de vie
en disant à Ibn ‘Abbass – qu’Allah a agréés :
« Profite de cinq choses avant cinq autres : ta jeunesse avant ta vieillesse, ta santé avant ta maladie, ta richesse avant ta pauvreté, ton temps libre avant d’être occupé et ta vie avant ta mort »[1].
3- Puis Allah interrogera l’être humain sur sa science – s’il fait partie des gens de science : a-t-il acquis cette science pour rechercher sincèrement la satisfaction d’Allah ou bien par ostentation et recherche de prestige ? Le savant sera donc parmi les premiers à rendre des comptes le Jour de la Résurrection, conformément au hadith où
« …et un homme ayant acquis la science, l’a enseignée et a lu le Coran. On l’amènera puis Allah lui rappellera ses bienfaits et il les reconnaîtra. Il lui demandera ensuite : "Qu’en as-tu donc fait ? ". Il répondra : "J’ai mémorisé le Coran et je l’ai enseigné, j’ai lu le Coran pour Te satisfaire". Allah dira : "Tu mens. Tu as plutôt acquis la science afin que l’on dise de toi que tu es un savant et tu as lu le Coran afin que l’on dise que tu es un récitateur. Or on a effectivement dit cela de toi". On ordonnera ensuite de le traîner sur son visage et de le jeter dans le Feu »[2].
Il sera également demandé au serviteur s’il a diffusé cette science avec sincérité ou bien s’il l’a tue, s’il l’a manipulée et s’il a menti aux gens alors qu’il la transmettait, dans le but d’obtenir la satisfaction de certains d’entre eux ? S’il a mis en pratique la science qu’il a acquise ou bien s’il a fait le contraire de ce qu’elle prescrit ?
Il serait ainsi inclu parmi ceux dont Allah dit :
﴾Commanderez- vous aux gens de faire le bien, et vous oubliez vous-mêmes de le faire, alors que vous récitez le Livre ? Êtes-vous donc dépourvus de raison ?﴿ .
﴾C’est une grande abomination auprès d’Allah que de dire ce que vous ne faites pas﴿.
4- La troisième question qui sera posée au serviteur portera sur sa richesse : Comment l’a-t-il acquise ? De manière licite ou illicite ? Comment l’a-t-il dépensée ? L’a-t-il mise au service de l’obéissance à Allah et de l’Islam ou bien l’a-t-il dilapidée en actes de désobéissance, pour satisfaire des désirs et commettre des péchés ?
5- La dernière de ces questions portera sur le corps, la force, la santé et la jeunesse du serviteur : Comment les a-t-il usés et dans quels domaines ?
Ce hadith ne signifie pas que le serviteur ne sera pas interrogé sur autre chose, mais qu’Allah demandera des comptes à chaque serviteur pour toutes ses paroles et ses œuvres. Toutefois, ces questions sont les questions les plus importantes qui seront posées au serviteur et toutes les autres en seront dérivées.
1. (1) Le serviteur doit s’empresser de se préparer à ces questions qui lui seront posées lorsqu’il fera
face à Allah. Le malheureux sera celui qui connaît les questions, mais ne sait pas y répondre.
2. (1) Certains croyants entreront au Paradis sans rendre de compte. Ils ne seront donc pas interrogés ni ne comparaîtront face à leur Seigneur.
« Soixante-dix mille de ma communauté entreront au Paradis sans rendre de compte. Ce sont ceux qui ne demandent pas que l’on pratique sur eux la roqya, ceux qui ne croient pas au mauvais augure (superstition), et s’en remettent à leur Seigneur »[3].
Qu’il est beau d’entrer au Paradis et plus beau encore d’y entrer sans rendre de compte ! Efforce-toi donc, autant que faire se peut, à faire partie de ces gens.
3. (1) Al-Foudayl Ibn ‘Iyad – qu’Allah lui fasse miséricorde – demanda à un homme : Combien d’années as-tu vécu ? Il répondit : Soixante ans. Il lui dit alors : « Tu marches donc vers ton Seigneur depuis soixante ans et tu es sur le point d’arriver ». L’homme dit : Nous sommes à Allah et c’est auprès de Lui que nous retournerons. Al-Foudayl lui dit ensuite : « Sais-tu ce que cela signifie ? Tu dis : Je suis un serviteur d’Allah et c’est auprès de Lui que je retournerai. Que celui qui est persuadé
d’être un serviteur d’Allah et qu’Il va retourner auprès de Lui, sache qu’il comparaîtra, et que celui qui sait qu’il comparaîtra sache qu’il sera interrogé, et que celui qui sait qu’il sera interrogé prépare des réponses aux questions ». L’homme demanda : Quelle en sera l’issue ? Elle sera facile, répondit Al-Foudayl. Quelle est-elle ? insista l’homme. Il répondit : « Tu œuvres avec excellence dans ce qui reste de ta vie et ce qui a précédé te sera pardonné, car si tu agis mal dans ce qui reste de ta vie tu seras puni pour ce qui a précédé et pour ce que tu vas commettre »[4].
4. (2) Le temps de vie est ce que l’être humain possède de plus important et ce ne sont que des jours et des heures comptés. Il convient donc que le serviteur soit conscient de la valeur de son temps et qu’il tire profit de ses heures pour obéir à Allah, car Allah lui demandera des comptes le Jour de la Résurrection sur toute sa vie. S’il s’est acquitté des obligations et des adorations demandées, il échappera au châtiment et connaîtra le salut. Dans le cas contraire, il connaîtra l’anéantissement et la perdition.
5. (2) Veille à tirer profit de ton temps pour effectuer des actes d’obéissance et parvenir aux plus hauts degrés. ‘Ali Ibn Abi Talib – qu’Allah a agréé – a dit : « Le bas monde on le parcourt en l’ayant derrière soi et l’au-delà on le parcourt en l’ayant devant soi, et chacun a des enfants. Soyez donc des enfants de l’au-delà et ne soyez pas des enfants de ce bas monde, car aujourd’hui on œuvre sans avoir à rendre de comptes et demain on rendra des comptes, mais on ne pourra plus œuvrer »[5].
6. (3) La science peut se retourner contre celui qui la porte. L’ignorant peut invoquer comme excuse l’ignorance, mais le savant qui connaît le jugement d’Allah et par passion y contrevient, n’a aucune excuse.
7. (3) On fait aumône de la science en la diffusant et en l’enseignant aux gens. Par ailleurs, taire la science est un des péchés majeurs et Allah menaça ceux qui le commettent des plus sévères punitions.
﴾ Certes ceux qui cachent ce que Nous avons fait descendre en fait de preuves et de guide après l’exposé que Nous en avons fait aux gens, dans le Livre, voilà ceux qu’Allah maudit et que les maudisseurs maudissent﴿
[Sourate Al-Baqara : 159]
Pour sa part, le Prophète ﷺ a dit :
« Celui qui est interrogé au sujet d’une science qu’il connaît et décide de la taire, Allah lui mettra le Jour de la Résurrection, un mors de feu »[6].
8. (4) La richesse est quelque chose de très important pour Allah, c’est la raison pour laquelle le temps de vie, la science et le corps n’ont qu’une seule question chacune alors que la richesse à deux questions : d’où provient-elle et comment l’a-t-on dépensée ? Le serviteur doit choisir la provenance de sa richesse et n’acquérir que ce qui est licite et ne dépenser que dans ce qui est licite.
9. (4) Les Compagnons – qu’Allah a agréés – se préoccupaient grandement de ne consommer que de ce qui est licite et délaisser ce qui est illicite ou douteux. Ainsi, Abou Bakr mangeait de la nourriture que son jeune esclave lui apportait. Un jour il l’informa que la nourriture qu’il mangeait provenait du revenu d’une divination qu’il avait faite, avant de devenir musulman, pour un homme alors qu’il ne connaissait rien à la divination et avait trompé cet homme. La divination ayant coïncidé avec ce qu’Allah avait décrété, l’homme fut satisfait et pour récompenser l’esclave il lui apporta de la nourriture. Lorsque Abou Bakr sut cela, il introduisit sa main dans sa bouche et vomit tout ce qu’il avait dans le ventre[7].
10. (5) Ton corps est un dépôt qu’Allah t’a confié. Préserve-le donc en obéissant à Allah et en te rapprochant de Lui et évite de le mettre dans des situations qui pourraient lui porter préjudice et lui faire désobéir Allah.
11. Un poète a dit :
Nous nous distrayons et nous entretenons d’agréables espoirs, alors que la mort inéluctable nous balaie et les balaie.
Établis donc les fondements de la piété tant que tu en as la capacité et sache que tu les retrouveras après la mort.Tu en cueilleras demain les fruits dans la Demeure de l’Honneur, où tu ne connaîtras ni rappel de faveur ni chagrin.
Références
- Al-Hâkim dans Al-Moustadrak (7846).
- Moslim (1905).
- Al-Boukhari (6472) et Moslim (220) d’après Ibn ‘Abbass – Allah a agréé les deux hommes.
- Voir Jami’ Al-’Ouloum Wa Al-Hikam d’Ibn Rajab (2/383).
- Ighatha Al-Lahfane d’Ibn Al-Qayyim (1/71).
- Abou Dawoud (3658), At-Tirmidhi (2649) et Ibn Maja (264).
- Al-Boukhari (3842).